Je ne comptes même plus le nombre d'heure que je dors par nuit. C'est juste un nombre hallucinant. Je rentre dans mon sixième mois de grossesse, et je me sens complétement épuisée. C'est dingue ce que ma fille pompait comme énergie. Moi qui était à la base du genre matinale, je dormais pratiquement jusqu'à midi. Je pouvais profiter de mon début de congé maternité pour recharger mes batteries. Mon énergie avait été mis à rudes épreuves ces derniers temps: une rivale à qui j'avais envie de crever les yeux, une relation amoureuse compliquée, l'apparition d'un demi-frère, et d'un ami de celui-ci. Trop de choses en peu de temps. J'avais bien dormi, au moins c'était déjà ça. Je profitais de chacune de mes nuits. J'avais pris directement mon déjeuner, rejoignant à table mon demi-frère et ma grand-mère. Je mangeais à grandes bouchées, comblant le bruit que mon estomac faisait. Je mangeais deux fois plus, et des fois je mangeais des choses assez spéciales. Ma grand-mère me disait que cet après-midi elle allait se balader avec Georgie, et je lui dis que je ne viendrais pas avec eux car j'avais des choses à régler à la boutique avant que je ne vienne plus pendant plusieurs mois. Il fallait que je donne des recettes à ma collègue pour qu'elle continue à produire sans que je sois là. Ma journée allait tout simplement être banale. J'avais prévu de passer voir mon meilleur ami, mais il me déclara qu'il n'était pas disponible aujourd'hui. Après le déjeuner je partis rapidement vers ma boutique avant d'entrer et de saluer chaleureusement ma collègue. On travaillait ensemble depuis le début et on s'entendait à merveille. Il y avait aussi quelques clients qui avaient déjà hâte que je revienne. Ce n'était qu'une question de mois, puisque je comptais bien reprendre mon travail après mon congé parental. J'avais déjà réfléchi à tout cela. Pourtant je devais bien en parler avec une personne et cette personne n'avait pas donné signe de vie depuis deux semaines. Il me manquait, et j'avais la trouille. La trouille qu'il soit parti définitivement avec sa femme et que je me sois fait planté. C'était probable.

J'avais passé le reste de la journée à traîner sur la plage à regarder la mer et à me reposer. Tout était calme, pour une fois il n'y avait pas de surplus de touristes. C'était vraiment agréable. Il était dix-sept heures et je m'accordais encore deux petites heures avant de rentrer chez moi. Georgie avait du être tout excité à l'idée d'avoir passer la journée à aller aux quatre coins de l'île et je savais déjà que je le retrouverais à me raconter ses exploits. C'était marrant d'avoir un petit frère en fait. En pensant à ça, je sortis mon téléphone de la poche de mon gilet assez long avant de composer le numéro de mon père. Bizarrement il ne s'était pas manifesté. Je m'étais relevée, commençant à marcher sur le sable. « Gemma? » « Oui ce n'est pas Georgie. » Silence. Je l'avais pris au dépourvu. « Je comptais te le dire. » « Quand? Quand tu viendrais sur l'île c'est ça? Figure-toi que moi aussi j'ai quelque chose à te dire: je vais avoir un bébé dans trois mois. » Autre silence. J'avais eu peur pendant le temps qu'il ne parlait pas qu'il était tombé dans les pommes. Non, j'aurai entendu un bruit suspect. Il ne disait rien. Le choc. Oui, apprendre que sa fille était enceinte de six mois, n'était pas de tout repos. « Je pense que je ne peux pas t'en vouloir de n'avoir rien dit. » « Exact. Tu arrives quand? » « Dans deux semaines. » J'avais hâte de le voir. Cela me ferait bizarre de partager des vrais repas de familles. Je gardais le fil de la conversation téléphonique avec mon père tout le long du trajet en direction de la maison. Cela me faisait du bien de passer du temps avec lui et j'avais l'esprit plus léger. Quand il sut que j'attendais une petite fille il était très heureux. Mon père je l'aimais tellement. Je raccrocha au bout d'un moment, me rendant compte qu'il était dix neuf heures et qu'il fallait que j'accélère le pas si je ne voulais pas attirer les foudres de ma grand-mère. J'avais enfin atteint la rue, puis ma maison et là... Sa silhouette je l'aurai reconnu parmi mille. Je restais un moment silencieuse, le regardant de dos avant de m'approcher. « Comme c'est gentil de te souvenir que j'existe. » Fis-je d'un ton cassant. Je lui en voulais, à un point inimaginable. Sans nouvelle depuis trois semaine, il aurait pu se passer tellement de choses: mais il s'en était passé! Je respirais ce pendant pour me calmer, mais je n'y arrivais pas. Il se retourna, je croisais son regard un instant. Je n'avais aucun sourire sur les lèvres, la bonne humeur de quelques minutes auparavant s'était envolée. Je vis alors le bouquet de fleurs qu'il tenait dans sa main. Vraiment? Il pensait se faire pardonner avec un bouquet de fleurs? Je n'avais pas envie de me donner en spectacle devant la maison, je n'avais pas envie que ma famille me voit dans un état déplorable. « Ton bouquet tu peux te le mettre là où je pense. »